Le plus ancien joueur de santur connu est Mohammad Hassan Khân, plus célèbre sous le surnom de ‘’Santur Khân’’ ; il vivait au milieu du XIXe siècle à la même époque que Ali Akbar Farâhâni et son nom est cité par Gobineau. Mohammad Shâh (1834-1848) devait supporter les douleurs de la goutte ; le soir, il demandait à Santur Khân de jouer pour pouvoir oublier la douleur et s’endormir. On ne sait rien sur son style de jeu, son école ou son maître ; en revanche, on sait que son meilleur élève était Mohammad Sâdeq Khân surnommé Sorûr ol-Molk.

Ce musicien est connu comme étant le chef (il était aussi surnommé ra’is) des musiciens de la cour de Nâssereddin Shâh et du naqâreh-Khâneh royal. Il connaissait tous les gusheh et il avait sa propre version du radif il jouait aussi du setâr, du kamâncheh et c’est lui qui aurait le premier accordé le piano à la manière iranienne. Sorûr ol-Molk était lui aussi, comme son maître, chargé d’endormir le roi en jouant de son instrument ; on rapporte qu’il mettait un tissu sur son instrument pour adoucir sa sonorité et jouait ainsi ‘’en aveugle’’ jusqu’à ce que le Shâh s’endorme.

Il a donné son nom à un gusheh du radif (‘’Mohammad-Sâdeq-Khâni’’) et son instrument peut être entendu dans le plus ancien document sonore de santur existant enregistré sur cylindre en 1898, document qui n’a jamais été publié. Il a formé des joueurs de santur réputés, qui sont passé à la postérité comme maîtres de l’instrument : Hassan Khân, Mirzâ Ali Akbar Khân (1857-1923), Somâ Hozûr (1852-1917).

On sait très peu de chose de Hassan Khân, surnommé Hassan Khân Santuri ; il était le chef d’un groupe dasteh et chantait aussi en même temps qu’il jouait, il nous reste trois disques de lui enregistrés en 1906 et répertoriés par Kinnear.

Mirzâ Ali Akbar Khân (1857-1923), aussi appelé Ali Akbar Shâhi, a appris le santur avec son père, Hosseyn Ali Khân qui lui même avait appris les techniques de l’instrument auprès d’un musicien indien qui était à la cour de Mohammad Shâh. Il était convoité par deux princes de la cour et pour éviter un conflit entre ces deux princes, il fut obligé de se réfugier dans une maison de thé royale, ce qui lui valut le surnom de ‘’Ali Akbar AbdârKhâneh’’ (ce qui pourrait se traduire par ‘Ali Akbar de la buvette’) ; puis, lorsque le roi lui-même le prit à sa cour, il devint ‘’Ali Akbar Shâhi’’ (ce qui signifie ‘Ali Akbar royal’). Il nous reste dix-huit enregistrements de ce musicien en solo ou en groupe, tous enregistrés en 1906 et répertoriés par Kinnear.

Somâ Hozûr (1852-1917) fut d’abord le joueur de zarb de Mohammad Sâdeq Khân dont il devint le meilleur élève. Khâleqi raconte, qu’il a entendu jouer en 1914 Somâ Hozûr accompagné au zarb par son fils, le célèbre Habib Somâ’i, alors âgé de 13 ans. Somâ Hozûr était un musicien de grand caractère qui devint mystique (il faisait la prière avec son instrument) à la fin de sa vie, il avait souvent l’habitude de jouer ‘’en aveugle’’ avec un tissu posé sur les cordes de son instrument.

Habib Somâ’i (1905-1946) commença son apprentissage en accompagnant son père, Somâ Hozûr, avec le zarb. Son père lui enseigna ensuite le santûr avec une discipline de fer ; lorsque le jeune garçon se trompait, son père le frappait sur les mains avec son mezrâb, quand il commençait à somnoler, il le frappait sur les paupières.

Il apprit la notation occidentale mais ne s’en serait jamais servi. Il lui arrivait souvent de chanter pendant qu’il jouait et ses chahâr-mezrâb sont célèbres pour leur originalité et leur forme si particulière et si bien adaptée à l’instrument. Son instrument ne peut être écouté que sur les cinq disques enregistrés en 1928 sous le nom de la chanteuse Parvâneh ; ces disques témoignent, malgré son jeune âge, de la maîtrise qu’il possédait de l’instrument et de son jeu brillant. Après 1940, il fut l’un des premiers musiciens à être diffusé par la radio Iranienne ; ces diffusions étaient réalisées au départ en direct, sans être enregistrées. Plus tard certains de ses enregistrements furent effacés, d’autres existent encore certainement dans des collections privées. On connaît beaucoup mieux ce musicien que les précédents, car de nombreux musiciens contemporains ont eu l’occasion de l’écouter et de le côtoyer ; malheureusement, son caractère difficile et son décès trop précoce n’ont pas permis qu’il crée véritablement une ‘’école’’ de santur ; pourtant, tout le monde s’accorde à dire que Habib est le père du santur savant contemporain et tous les grands joueurs de santur ont étudié ses œuvres et son style de jeu. Le maître AbolHassan Sabâ (1902-1957) disait de lui qu’il était un grand génie. Ce même maître, qui fut brièvement l’élève de Somâ’i, a transcrit un certain nombre de gusheh joués par Somâ’i en segâh et chahârgâh, qui pourraient constituer une partie d’un radif propre au santur ; ces gûsheh font actuellement partie de l’enseignement du santur par la méthode de AbolHassan Sabâ.

photo : Aqâ Rezâ Khân 1863
Musiqi-e iran dar sadeh gozashteh, Téhéran, Matn, 1390/2011

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