مرا گفتی چو من یاری نداری
تو هم چون من وفاداری نداری

« Marâ gofti cho man yâri nadari / To ham chun man vafâdâri nadari » (« Tu m’as dit que tu n’as pas une bien aimée comme moi / Tu n’as pas non plus un fidèle ami comme moi »), Hâdi Deylami (Poète et musicien de l’époque Safavide (1502-1722), qui vivait à Qazvin).

Il faut nouer une relation affective avec n’importe quel instrument. Un instrument a une âme et des sentiments. Il ressent l’affection, c’est pourquoi j’ai commencé par ces premiers vers de Deylami, qui a composé une chanson pour son instrument.

Parfois, nous n’arrivons pas à accorder l’instrument. On dit souvent que l’instrument s’est fâché contre son propriétaire, ou bien qu’il ne faut jamais le prêter à quelqu’un d’autre, sauf s’il s’agit d’un maître sinon l’instrument se fâche. L’on dit encore qu’un bon instrument de musique trouvera lui-même son propriétaire.

Je vais raconter deux expériences personnelles à ce sujet.
Un jour, un musicien, qui vivait en Belgique, m’a demandé de lui prêter mon santur pour un concert. Il avait déjà vu mon instrument en Iran, mais je le lui ai prêté avec beaucoup d’hésitation. Quand il me l’a rendu, pendant un an, j’ai eu l’impression de ne pas reconnaître mon santur. Sans comprendre pourquoi. De son côté, mon ami disait que ce n’était pas le même instrument que celui qu’il avait vu en Iran, et qu’il avait eu beaucoup de difficulté pour l’accorder. Quelques années plus tard, Ostâd Pâyvar avait un concert avec des maîtres de musique persane à Paris, avec le fameux chanteur Nâzeri. Il m’a demandé de lui prêter mon santur, car à la fin de son concert il devait interpréter une chanson kurde. Je le lui ai donc prêté, et j’étais vraiment étonné de constater que l’instrument n’avait pas été modifié.

En 1992, de passage à Téhéran chez mon professeur, j’ai vu un santur dont je suis tout de suite tombé amoureux. Un instrument vraiment beau, très féminin, et d’une sonorité magnifique. Mon professeur m’a dit que le luthier voulait le vendre et il m’a conseillé de l’acheter tout de suite car un bon instrument était difficile à trouver et qu’un de ses élèves pourrait l’acheter. Malheureusement je n’en avais pas les moyens. Deux ans plus tard, je l’ai revu chez mon professeur avec un très grand plaisir, mais je n’avais toujours pas les moyens de l’acquérir. L’année suivante, mon professeur est venu en France pour donner un concert avec un ensemble. Le luthier lui avait demandé d’emporter le santur au cas où quelqu’un serait intéressé. Je ne pouvais toujours pas l’acheter. Quelques mois plus tard, mon professeur est revenu en France, toujours avec ce fameux santur. Entretemps, l’épouse d’un ami musicien souhaitait prendre des cours et son mari m’a demandé si je pouvais lui trouver un bon instrument. J’ai pensé qu’en l’achetant pour elle, je pourrais au moins le voir de temps en temps et je l’ai acheté. Elle a pris quelques cours avec moi, puis elle a désiré continuer avec quelqu’un d’autre. Et je n’ai plus vu mon instrument ! Après quelques mois, mon ami m’a appelé pour m’annoncer leur divorce et me dire que dans la séparation de biens, il devait racheter le fameux santur. Il me le proposait car lui n’en jouait pas, et il était très dommage qu’un si beau santur reste dans sa boite … Enfin, j’ai eu mon santur !

Non classé

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *